Le rire est satanique, il est donc profondément humain. » Charles Baudelaire
in De l’Essence du rire
Durée estimée : 1h20
A partir de 12 ans
Jeu et conception : Solal Bouloudnine
Texte : Solal Bouloudnine et Maxime Mikolajczak, avec la collaboration d’Olivier Veillon
Mise en scène : Maxime Mikolajczak et Olivier Veillon
Création lumière et son, régie générale : François Duguest
Régie lumière : Olivier Maignan
Musique : Michel Berger
Costumes et accessoires : Elisabeth Cerqueira et François Gauthier-Lafaye
Administration : Antoine Lenoble
Production : Mathilde Bonamy et Augustin Bouchon
Diffusion : La Loge – Mathilde Bonamy & Alice Vivier
Production : L’OUTIL
Coproductions : NEST – Centre Dramatique transfrontalier de Thionville – Grand Est, Comédie de Béthune – CDN Hauts-de-France, Théâtre Dijon-Bourgogne – CDN, Théâtre Sorano, Les Plateaux Sauvages, Printemps de comédiens
Soutiens : Théâtre de l’Aquarium, CENTQUATRE-PARIS, Carreau du Temple, festival FRAGMENT(S) #7, L’Annexe, la Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Île-de-France, la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bourgogne Franche-Comté, Ville de Dijon, avec le soutien du Fonds SACD Humour/One Man Show
INTENTION
Avec La Fin du début, le comédien Solal Bouloudnine nous plonge dans l’univers d’un enfant des années 90 qui réalise, comme tous les enfants avant et après lui, que tout a une fin, à commencer par la vie. Nous traversons avec lui une vie marquée par l’angoisse de la fin, dans une comédie touchante et vertigineuse.
Une bouchère bourguignonne, un chirurgien facétieux, un rabbin plein d’histoires, une maîtresse en burn out, France Gall… À travers une galerie de personnages un peu fous et au son des chanson de Michel Berger, on rit avec Solal Bouloudnine de l’atrocité du cancer, des maladies vénériennes et cardiovasculaires, gastriques aussi, et cérébrales, de la solitude qui le ronge terriblement, de l’incommunicabilité entre les êtres, de l’enfance insouciante et naïve qui s’en est allée à jamais, viciée par les assauts du monde insurmontable, injuste et cruel.
La Fin du début est un spectacle de variété qui se vit comme une chanson épique, ou l’inverse. C’est un mercredi après-midi entre copains dans une chambre d’enfant où les jouets activent les histoires les plus folles.
Je fuis le bonheur de peur qu’il ne se sauve pas. » Francis Picabia
in Jésus-Christ Rastaquouére
Comment est né ton désir d’écrire ce spectacle ?
J’ai eu la chance ces dernières années de travailler en tant que comédien avec Alexandra Tobelaim, les Chiens de Navarre, Baptiste Amann… et de m’investir dans les diverses productions de l’Outil (l’IRMAR, Spectateur : droits et devoirs…). Je m’épanouis en tant qu’interprète mais j’ai le désir depuis longtemps de raconter mes propres histoires, d’offrir ma vision des choses. Le monologue s’est vite imposé comme la forme idéale.
Ah oui ? Et pourquoi ça ?
Depuis plusieurs années, je joue seul en scène avec la metteure en scène Alexandra Tobelaim (Italie- Brésil 3 à 2 et récemment Abysses, deux textes de Davide Enia). Je suis à chaque fois frappé par la force et l’impact que l’on peut avoir sur un plateau presque nu. C’est cette forme simple et puissante que j’ai voulu développer avec mes mots et mes histoires.
Dans La Fin du début tu interprètes plusieurs personnages, dans la tradition de comiques français comme les Inconnus ou les Nuls. Qu’est-ce qui te plaît tant dans cette forme ?
Le risque qu’il y a à mener un solo m’intéresse et me stimule en soi, mais le fondement de mon désir c’est surtout le plaisir et le défi qu’il y a à composer plusieurs personnages : jouer avec des accents, changer de voix, porter des perruques et des costumes en étant le plus crédible possible. À l’encontre d’un mouvement qui invite les acteurs à improviser à partir de ce qu’ils sont, à rapprocher le personnage d’eux-mêmes, l’ambition est finalement de faire oublier l’acteur avec des artifices bien visibles.
Quelle a été ta méthode pour l’écriture de «La Fin du début ? »
Le procédé, emprunté à Philipe Caubère, est très simple : j’ai improvisé seul devant ma caméra à partir de souvenirs et ou de personnes charismatiques qui m’ont marqué. Puis j’ai soumis mes improvisations à mon camarade Maxime Mikolajczak et ensemble nous avons trié le bon grain de l’ivraie et retravaillé les séquences pour construire des scènes. Olivier Veillon est arrivé un peu plus tard dans le processus pour nous aider à composer la dramaturgie du spectacle.
Michel Berger est central, dans ton spectacle. Pourquoi lui ?
J’avais six ans onze mois et vingt jours quand il est mort, terrassé par une crise cardiaque dans sa villa de Ramatuelle, après une partie de tennis. C’était le 2 août 1992, je passais mes vacances dans une maison à quelques mètres de la sienne. Je me souviens des sirènes de pompiers, des fans en larmes qui déposaient des fleurs devant sa maison, de ses chansons qui passaient en boucle à la radio… C’est ce jour-là que j’ai pris conscience de la mort et surtout du fait que tout a une fin. Depuis je ne cesse de craindre la fin et toute l’écriture du spectacle s’articule autour de cette angoisse qui ne m’a jamais quitté.
Donc Michel Berger est un déclencheur de conscience ?
Pas seulement ! Bien-sûr sa vie est très inspirante, mais c’est aussi un compositeur et un chanteur magnifique. Je ne crois pas comme Gainsbourg que la chanson de variété soit un art mineur. Avec Michel Berger je veux rendre hommage à la variété et à son pouvoir de consolation. Tout le monde peut s’identifier aux paroles de Seras-tu là ? après une rupture amoureuse. Les chansons sont des alliées, elles sont un remède à la solitude.
Tu t’amuses à balader le spectateur en inversant le début, le milieu et la fin du spectacle. C’est une façon de conjurer la fin ?
Oui, exactement. Enfin c’est une tentative, car si la fin devient le début, il y aura donc automatiquement une autre fin à cette fin qui devient le début, et inversement, non ? On ne peut pas échapper à la fin. Ce spectacle est un voyage vers l’acceptation de la fin.
On t’a vu évoluer dans des registres très différents à travers les spectacles auxquels tu participes depuis quinze ans. Avec « La Fin du début ? » tu proposes une comédie effrénée, féroce. C’était une nécessité pour toi de faire rire ?
Le rire est le plus court chemin entre deux personnes, comme disait Chaplin. Je trouve absurde que l’humour continue à être considéré comme un registre mineur par certains, alors que le lien qu’il crée est essentiel ! Les bébés rient avant de parler, non ? C’est la forme de communication la plus simple, la plus primaire, la plus puissante. En osant la comédie pure, je réalise aussi un rêve d’enfant, je me sens vraiment à ma place.
La vérité faut que tu fasses un spectacle tout seul, mon fils, une sorte de ouane manne chaud, t’y es trop gracieux. » Ma mère – in la Vie
Tes personnages sont épiques, fantaisistes, hauts en couleurs, on a une vraie tendresse pour eux. C’était important pour toi de ne pas te cantonner à la caricature et de leur donner une profondeur ?
Oui, bien sûr, je voulais que l’émotion puisse trouver sa place dans leur folie. J’ai imaginé des personnages de fiction mais c’était important de partir aussi de vraies personnes (mes parents, mon coach de foot, ma bouchère…), en espérant qu’en livrant des morceaux de mon histoire intime, comme un chanteur de variété, on puisse se sentir comme en famille. Je voudrais que chacun puisse se retrouver à travers eux.
C’est la fin de cet entretien. Ça va aller ?
Évidemment. Évidemment.
Propos recueillis par Brigitte Bérault-Lambert